Sarah Montet n’apprécie guère le terme de performance pour désigner l’expérience qu’avaient pu vivre celles et ceux qui étaient convié·es à son diplôme, Ungrateful dawn : pour elle, il s’agissait plutôt d’une zone d’occupation prenant place sur une journée complète. Au cours de celle-ci, le lieu a été tantôt silencieux, tantôt bruissant, il s’y est raconté des histoires, déclamé des manifestes, on y a joué de la musique électronique, de la tisane a été partagée, de l’encens a été brûlé… Des apparitions, nimbées d’une lumière orangée, vêtues de ponchos, de baskets et arborant des lampes frontales, ont déambulé entre les sculptures présentées là, sur fond sonore de pluie persistante qui n’en finissait pas de tomber.

Dans une période plus qu’incertaine, Sarah Montet propose un écosystème qui pourrait fort bien être une image quelque peu trouble d’un monde d’après l’Apocalypse, sans doute plus hanté qu’habité. Mais l’aube pointe, au loin : des espaces possibles se dessinent, qui pourraient être des grottes artificielles, des folies du 18e siècle, des jardins merveilleux où tout demeure à réinventer. Ungrateful dawn, c’est aussi la revanche d’une jeunesse qui n’en finit pas de trépigner à force de ne pas trouver ses propres lieux, et qui décide d’imposer sa présence et de bâtir sa cabane ou son refuge dans ce qui était auparavant interdit. Si la désillusion fait partie de ce potentiel avenir, ce dernier ne manque toutefois pas d’un fol espoir romantique, distillé par la constitution de nouvelles communautés unies contre la solitude inhérente à ces temps pandémiques.

C.Paulhan